Les nouvelles technologies vont bouleverser nos métiers d’ici 2030 !
Servan LÉPINE, dirigeant d’EXCELIUM et président de la commission technologies du GES, était l’invité lors de la rencontre passée avec le magazine Protection Sécurité Magazine (PSM).
Mi-septembre s’est tenue à Marseille une importante table ronde regroupant l’AN2V, l’Aditec, le GPMSE et le GES, en présence du préfet Olivier de Mazières de la DPSIS. Les débats ont été riches et ont permis d’aborder toutes les questions qui devraient permettre à la sécurité d’intégrer les nouvelles technologies, les nouvelles pratiques, les nouveaux modes opératoires qui devront être les siens d’ici 2030, afin de s’inscrire pleinement dans un continuum de sécurité réel et efficace.
À l’occasion du deuxième Congrès national du GES des 16 et 17 septembre derniers à Marseille, une table ronde s’est tenue avec les quatre organisations professionnelles dans le domaine des technologies de sécurité (AN2V, Anitec, GPMSE et GES) en présence du préfet Olivier de Mazières de la DPSIS, sur l’émergence des nouvelles technologies en sécurité privée en 2030. Quels sont les principaux enseignements de cette table ronde ?
Les études indiquent qu’il faudra compter en 2030 sur une population mondiale de huit milliards, une recrudescence des flux migratoires liée aux problématiques climatiques, l’apparition de nouvelles mégapoles à fortes concentrations humaines mais aussi la généralisation du véhicule autonome et autres robots qui vont transformer un certain nombre de nos usages.
La transformation digitale des équipements technologiques de sécurité va également continuer à s’imposer de manière importante en s’associant aux prestations humaines de sécurité, comme nous l’observons depuis une vingtaine d’années dans le domaine de la sécurité aéroportuaire notamment.
La généralisation du protocole IP comme base de l’ensemble des systèmes de sécurité (anti-intrusion, incendie, contrôle d’accès, robotique, etc.) et le développement des caméras de vidéosurveillance longue portée à vision nocturne vont permettre la surveillance de très vastes espaces extérieurs et intérieurs avec la détection simultanée de comportements caractérisés (présence sur site, tentative de vols, attentats, incendie, etc.) en interaction avec divers automates (terrestres, aériens et aquatiques).
La puissance de calcul de ces systèmes associée à l’intelligence artificielle va permettre de renforcer le contrôle des accès aux sites, de les fluidifier avec la reconnaissance faciale, et de développer la détection prédictive en association avec les différents systèmes de sécurité.
Quelle sera la place des drones et des robots dans cette nouvelle approche des technologies de sécurité ? Quid des réseaux de communications et évidemment de la protection des données dans ce nouvel environnement ?
Les drones et les robots de sécurité viendront compléter l’analyse des risques avec rapidité et efficacité en transmettant des levées de doutes visuelles sur les sites ou les secteurs les plus sensibles, permettant – à distance – aux agents de sécurité d’analyser et de valider toute anomalie.
Par ailleurs, les réseaux de télécommunication continueront aussi de se développer avec l’émergence du très haut débit. Les objets connectés, permettant l’interconnexion de milliers de capteurs agrégés dans les bâtiments (smart building) ou les villes (smart city), imposeront aussi un indispensable renforcement de la sécurisation des accès et réseaux de télécommunication.
Enfin, le stockage et la protection des données seront décuplés et certaines données de sécurité seront isolées pour les transférer directement aux forces de l’ordre, pompiers, services civils de sécurité dans le cadre du continuum de la sécurité.
Comment les activités de sécurité devront-elles évoluer face à ces révolutions technologiques et comment la sécurité privée devra-t-elle les accompagner ?
À ce sujet, et lors de cette table ronde, plusieurs principes ont été abordés.
Le premier a concerné la nécessaire évolution du cadre réglementaire pour l’utilisation de ces nouvelles technologies digitales.
Si des travaux sont déjà lancés au niveau européen pour normaliser celles-ci, notre cadre national a du mal à évoluer au même rythme, bien que le cadre du RGPD soit venu renforcer la protection des données personnelles. Il en est ressorti qu’une réflexion devrait être rapidement menée pour permettre de les intégrer plus rapidement à la mesure des transformations numériques qui s’opèrent : or, l’environnement juridique limite très souvent cette intégration et n’ouvre pas assez à des expérimentations.
Le deuxième principe a concerné l’accès économique de ces technologies.
Dans la perspective des futures revalorisations salariales des activités privées de sécurité, celles-ci devront permettre de mutualiser les moyens humains pour engager les investissements technologiques nécessaires et leur exploitation.
Le troisième principe a concerné la formation et l’accompagnement du personnel de sécurité et de leur encadrement qui va devoir s’engager rapidement dans des formations orientées sur l’utilisation de ces nouveaux équipements technologiques et informatiques, comme on a pu déjà l’observer depuis quelques années à l’embarquement des avions.
Par contre, il y a eu unanimité entre tous sur la nécessité d’intégrer dès que possible les bureaux d’études et les techniciens qui interviennent dans la conception et la réalisation de ces systèmes de sécurité dans un cadre réglementé, afin de leur imposer une qualification professionnelle et un contrôle régulier de leur casier judiciaire : l’attribution d’une carte professionnelle ira de pair avec un engagement à une stricte application des règles de sécurité informatique.
Trop de négligences ont déjà été observées aux dépens de la sécurité des infrastructures informatiques de sites sensibles.
Comment rendre la relation entre les forces régaliennes et la sécurité privée plus efficace ?
Cette question des relations entre la sécurité privée et les forces de sécurité publique qui ont autorité et compétence pour intervenir dans les situations les plus sensibles (vols, agression, attentats, inondations, etc.) est un enjeu majeur et a évidemment été abordé lors des débats.
Leur efficacité passera par leur capacité à pouvoir rapidement exploiter les informations qualifiées transmises et à pouvoir avoir accès à certaines installations technologiques afin d’être en mesure d’intervenir rapidement et efficacement.
C’est tout le sens du continuum de la sécurité qui se met en place progressivement mais qui manque encore de lignes directrices pour préparer l’intégration de ces nouvelles technologies digitales.
Une véritable opportunité se présente à nous afin d’affirmer la place de ces dernières : les prochains grands événements sportifs pourraient voir survenir, pour la première fois sur notre territoire et dans notre secteur, le plus grand mix « agents de sécurité/technologies de sécurité ».
BIO EXPRESS
• 1999 Directeur régional chez Securitas France, division télésurveillance
• Depuis 2003 Président fondateur d’Excelium (Groupe Exceliance)
• 2014 Fonde le Consortium Sécurité Privée (CSP)
• Depuis 2019 Cofondateur et administrateur du GES et président de la commission technologie du GES
Article rédigé et publié par Protection Sécurité Magazine